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Les écrivains / adhérents

Claudine Layre

Roman / Essais / Théâtre / Traduction
photo Claudine Layre

Éprise de la langue allemande, j’ai eu la chance de passer dès ma prime adolescence un mois par an dans une famille de la Forêt bavaroise. J’ai réussi les concours pour enseigner l’allemand en France (dont l’agrégation en 1984). J’ai été mutée dans le Nord puis l’Ouest de la France ; j’ai été lectrice de français à l’Université de Giessen (Hesse, Allemagne). Je suis bilingue. Pour moi, enseigner et traduire relèvent du même désir : faire tomber des murs, construire des ponts, contribuer à la connaissance de l’Autre.
Je suis passionnée par l’infini des mots, leur polysémie, leurs combinaisons. Je ne peux me passer de littérature, de connaissances sur l’histoire et la politique.
Je lis, entre autres, des textes d’hommes ou de femmes révoltés originaires du Maghreb, d’Iran, d’Afrique noire, de Chine...

Spécialités
- Littérature, y compris romans policiers et pièces de théâtre
- Histoire et politique : fascisme et antifascisme, femmes, révolutions, écologie…
- Enseignement, formation, interculturalité

http://www.atlf.org/members/layre/
Bibliographie

Ouvrages
– Correspondance entre Alfred Nobel et Bertha von Suttner, Éd. Turquoise, 2016
– Le feu aux poudres. Qui a déclenché la guerre en 1914 ?, G. Krumeich, Éd. Belin, 2014
– Clarissa et Les deux sœurs, Stefan Zweig, Gallimard/La Pléiade, dir. J-P. Lefebvre, 2013
– Exil sous le croissant et l’étoile. Rapport d’Herbert Scurla sur les universitaires allemands en Turquie pendant le IIIe Reich, F. Sen et D. Halm, Éd. Turquoise, 2009
– Reconstruire une République, K-J. Hölkeskamp, dir. F. Hurlet, Éd. Maison, 2008
– La Suisse esclavagiste. Voyage dans un pays au-dessus de tout soupçon, H. Fässler, Éd. Duboiris, 2007

Articles
– « Le crime est politique », Thomas Wörtche, « L’Indic’ », 2017
– « La science pense en plusieurs langues », K. Ehlich, W. Krämer, B. Stiegler, J. Trabant, Trivium, Maison des Sciences de l’Homme, 15/2013
– « La main de Flaubert », M. von Koppenfels ; « L’Arcadie : le monde du kitsch ? Degrés zéro de l’arcadien dans Madame Bovary », M. Föcking, Trivium, 11/2012
– « Situation sociale et maladies psychiques des migrants en Autriche », T. Stompe, D. Holzer, K. Ritter, Colloque « Idées d’identités », Université de Nantes, 2011
– « Les provinces germaniques : champ d’analyses historico-religieuses », W. Spickermann, Rome et l’Occident, dir. F. Hurlet, PUR, 2009

Théâtre
– La fille d’Edelmann, pièce de Jakob Arjouni, L’Arche Editeur

Cinéma : traduction de sous-titres Colloque « Idées d’identité », Nantes, 2011
« Natasha » www.natasha-der-film.at/
« Operation Spring » www.austrianfilms.com/film/operation_spring

Extraits

1/ Extrait de « CLARISSA », roman posthume de Stefan Zweig

Les deux amoureux, lui Français, elle Autrichienne et fille de militaire, passent des jours heureux en Italie. Il apprend dans le journal que l’Autriche a déclaré la guerre à la Serbie.

Ils eurent soudain l’impression que le sol s’était dérobé sous leurs pieds. A côté, il y avait un café dans la galerie Victor-Emmanuel. Il vit qu’elle avait pâli. Ils s’assirent. « Est-ce que tu dois rentrer dans ton pays ? » « Je devrais », répondit-elle, « mais je n’irai pas. Non. Aussi longtemps que tu resteras avec moi. Mon père ne le comprendra pas. Je te suivrai, où tu veux, même en France. Je suis une femme. La loi est sage. Elle envoie la femme là où vit le mari auquel elle appartient. Elle n’a pas à rentrer dans sa patrie. On lui dit où est sa place. » […]
« Dois-je m’en aller ? »
« Non », dit-il. « Mais nous ne pourrons pas en rester là si nous sommes entraînés dans la guerre. Je suis soldat. Ce n’est pas le problème. Je pourrais devenir brancardier. Mais il est probable que je déserterais. Et alors, je ne pourrais pas t’emmener avec moi. Je ne peux pas laisser les autres être des victimes et être heureux moi-même. Je ne peux pas déserter, ce serait un crime. Mais en même temps, je voudrais quand même être heureux. Peut-être que ce sera plus facile sans toi. »
Clarissa eut peur. « Tu penses que la France va … »
« À quoi sert ce que nous pensons ? Qui sommes-nous ? Ce sont les grands de ce monde qui disposent de nous. […] nous avons Jaurès, c’est un soutien pour nous. Voilà que les empereurs s’envoient des télégrammes. J’ai le sentiment qu’ils ont pris peur. Maintenant, l’univers entier a peur. Rien ne pourra nous aider. Aucune sagesse. »
Cela n’avait guère de sens de se promener dans les rues par des journées pareilles. « Que devons-nous faire ? »
« Faisons le même chemin en sens inverse. […] » Ils retournèrent sur les lieux. Ils virent tout encore une fois. C’était le même paysage. Mais les gens avaient changé, eux-mêmes avaient changé. […] Un oiseau chantait. « Est-il possible qu’il existe autant de beauté ? Est-il possible que tout cela finisse absurdement ? Chaque arbre a un sens. Tout a été pensé. Chaque fleur se protège grâce à ses feuilles. La pluie jaillit et nourrit. Tout fait partie d’un ordre. Et tout cela pourrait être détruit ! ».

2/ Extrait de « La fille d’Edelmann » de Jakob Arjouni
Après la réunification allemande. Ruth interroge son père sur leur vie entre 1940 et 1945 à Berlin.

RUTH un temps ; attend impatiemment… Nous avons quitté le grenier pour nous installer dans une cabane de jardin ouvrier, jusqu’à l’arrivée des Russes – continue !
HINZ Pendant cinq…
RUTH l’interrompt… ans, je sais ! Dissimulés, désespérés, gazés ! Mais ensuite ?!
HINZ Quand nous sommes revenus dans notre ancien appartement, nous avons croisé deux voisins de l’époque, qui la veille étaient encore des nazis. Ils ont d’abord été surpris puis ils ont fait semblant d’être aimables. Quand j’ai poursuivi mon chemin, ils m’ont poussé contre le mur et m’ont menacé : si je les dénonçais, ils te massacreraient…
RUTH Tu t’attendais à un bouquet de fleurs ?
HINZ Dans l’appartement, tout était comme avant […]. Nous étions comme des morts visitant leur propre mémorial, […]. Puis, je me suis mis à la recherche de parents et d’amis ; j’ai frappé à chaque porte, d’une absence d’information à une autre. C’était ridicule.
RUTH Tu as cherché pendant combien de temps ?
HINZ regarde Ruth Aussi longtemps que nous en avons eu la force… Je n’étais pas seul.
RUTH Tu aurais pu me laisser chez les voisins.
HINZ Chez des gens qui ne nous saluaient même pas ? Chaque fois que nous les croisions, ils s’arrêtaient de parler. Ils avaient pensé que ça au moins, c’était réglé. Désormais, ils avaient peur de nous. Une voisine m’a demandé pardon et a dit qu’on devait recommencer à vivre ensemble comme avant. Puis son mari est rentré de captivité et toutes les nuits, bourré, il faisait du raffut dans la cage d’escalier, il gueulait qu’il avait perdu une jambe pour la patrie mais que moi, le saboteur juif, j’avais un plus grand logement que lui.
RUTH Et c’est là que tu as commencé à… ?
HINZ Je n’ai pas commencé à... Je n’ai tout simplement plus rien raconté.

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Lieu de vie

Pays de la Loire, 44 - Loire-Atlantique