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Les écrivains / adhérents

Amina Saïd

Poésie / Contes / Traduction
photo Amina Saïd

Amina Saïd est née d’un père tunisien et d’une mère française à Tunis, où elle a grandi. Elle a commencé à écrire des poèmes dès l’enfance. Après ses études à la Sorbonne, elle enseigne à la faculté des lettres de Tunis, avant de s’installer à Paris tout en faisant de fréquents séjours dans le pays de sa naissance. Elle s’oriente ensuite vers le journalisme. Ses poèmes sont traduits en plusieurs langues et sont présents dans de nombreuses anthologies et revues. Elle a traduit des nouvelles et six romans du grand écrivain philippin F. Sionil José.

L’œuvre poétique d’Amina Saïd est essentiellement une quête ontologique, un voyage au long cours dont chaque recueil est une étape. Tout poème y est mouvement, élan spirituel, flux générateur. Sont mises en question l’aventure humaine – existentielle, symbolique, historique – et l’identité, toujours à construire, comme l’œuvre elle-même, incandescente et limpide. Une dialectique constante des complémentarités et des séparations hante cette poésie, dont l’une des composantes est l’attachement aux deux rives de la Méditerranée. Une appartenance qui ressemble fort à l’exil et légitime la quête du lieu, l’errance, comme elle génère la prolifération des doubles et des oppositions.
Les poèmes aux images fulgurantes et remarquablement rythmés mettent en valeur la sobriété, la concision, l’étonnante densité sensuelle d’une écriture dont les spirales entraînent le lecteur au cœur des antiques prophéties. Car le poète, familier des grands mythes, en irrigue son imaginaire, sans jamais occulter les enjeux contemporains, ni paraphraser la vie réelle, et tout en assumant le féminin singulier de sa condition objective. Une parole intense, dictée par l’absolue nécessité, une œuvre mouvante et émouvante qui atteint à l’universel.

Ghislain Ripault

Bibliographie

Poésie
– Paysages, nuit friable, Barbare, Vitry-sur-Seine, 1980.
– Métamorphose de l’île et de la vague, Arcantère, Paris, 1985.
– Sables funambules, Arcantère/Ecrits des forges, Paris - Trois-Rivières (Québec), 1988 ; Arenas Funambulas, traduction de Myriam Montoya, Fundacion Editorial El Perroy y La Rana, Ministerio de la Cultura, Caracas (Venezuela), 2006.
– Feu d’oiseaux, Sud n° 84, Marseille, 1989 (prix Jean Malrieu, Marseille, 1989).
– Nul Autre Lieu, Ecrits des forges, Trois-Rivières (Québec), 1992.
– L’Une et l’Autre Nuit, Le Dé bleu, Chaillé-sous-les-Ormeaux, 1993 (prix Charles Vildrac, Paris, 1994).
– Marcher sur la Terre, La Différence, Paris, 1994.
– Gisements de lumière, La Différence, Paris, 1998.
– De décembre à la mer, La Différence, Paris, 2001.
– La Douleur des seuils, La Différence, Paris, 2002.
– L’horizon est toujours étranger, CD, Artalect, Paris, 2003.
– Au présent du monde, La Différence, Paris, 2006.
– Tombeau pour sept frères, calligraphies de Hassan Massoudy, éditions Al Manar, Neuilly, 2008.
– L’Absence l’inachevé, La Différence, Paris, 2009.
– Les Saisons d’Aden, éditions Al Manar, Neuilly, 2011.
– The Present Tense of the World: Poems 2000-2009, traduction et préface de Marilyn Hacker, édition bilingue, Black Widow Press, Boston, 2011.
– Le livre intérieur, Mon royaume pour un livre, seize écrivains racontent, coédition Le Castor astral-L’Atelier imaginaire (Bègles, 2013).
– Le Corps noir du soleil, calligraphie de couverture de Hassan Massoudy, éditions Rhubarbe, Auxerre, 2014.
– Amina Saïd, Clairvoyante dans la ville des aveugles. Dix-sept poèmes pour Cassandre, Editions du Petit Véhicule, Nantes, 2015.
– L’obscur en sa lumière, Lignes de vie, dix-huit écrivains disent leur rapport à la poésie, coédition Le Castor astral-L’Atelier imaginaire (Bègles, 2015).
– Chronique des matins hantés, peintures d'Ahmed Ben Dhiab, Editions du Petit véhicule, Nantes, 2017.
– Dernier visage avant le noir, éditions Rhubarbe, Auxerre, 2020.

Contes de Tunisie
– Le Secret (contes), Critérion, Paris, 1994.
– Demi-Coq et compagnie (fables), illustrations d’Ahmed Ben Dhiab, L’Harmattan, Paris, 1997.

Traductions de l’anglais (Philippines) d’œuvres de F. Sionil José
– Le Dieu volé, nouvelles, préface, coédition Critérion/Unesco, Paris, 1996; 2e édition, 2004
– Viajero, le Chant de l’errant, roman, préface, Critérion, Paris, 1997; 2e édition, 2004
Cinq romans de la « saga de Rosales » :
– Po-on, Fayard, Paris, 2001.
– A l’ombre du balete, Fayard, Paris, 2002.
– Mon frère, mon bourreau, Fayard, Paris, 2003.
– Les Prétendants, Fayard, Paris, 2005.
– José Samson, Fayard, Paris, 2007.

Extraits

le navire blanc raccordait les étés
d’une double enfance

il soufflait un vent de sables rouges
qui creusait des trous dans le soleil
la mer bouillonnait sur les rochers à vif
un ciel sans merci partageait en deux nos visages

de l’autre côté de la mer j’oubliais une langue
pour en apprendre une autre puis l’oubliais

un alphabet inventait ses couleurs
le temps se conjuguait en plusieurs temps
les consonnes s’étranglaient aux lacets de la gorge

de l’autre côté des frontières
une guerre se perdait une guerre se gagnait
les enfants naissaient sans enfance
leurs yeux s’ouvraient sur des sables rouges
on leur faisait oublier leur langue
pour leur en apprendre une autre

de l’autre côté de la mer
je remplissais des cahiers d’absence
regardais sur des photos grises
des moitiés de visages

les mots suivaient des chemins mystérieux
pleins de questions sans réponse
une main comptaient les doigts du monde
les chiffres s’inversaient

dans les miroirs les rêves se dédoublaient
les nuits suaient leurs nœuds de lumière

Poème extrait du recueil «Cérémonie de l’eau du feu et du sang» (inédit).

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«La patrie est là d’où l’on part», a écrit T.S. Eliot. Franchir la Méditerranée avait été une rupture brutale, douloureuse, une fracture à partir de laquelle il ne pourrait y avoir qu’un avant et un après. J’avais quitté à jamais la patrie de l’enfance. Ce fut la fin de l’innocence. Mais aussi le début de l’expérience. Or je pressentais qu’il me fallait à tout prix garder vivant l’enfant que j’avais été. Longtemps les tourments suscités par ce que j’ai vécu comme un exil trouveront un écho dans les textes que j’écrirai. Comme si faire resurgir le paysage natal, solaire, celui de l’origine, par et dans l’écriture et grâce à la mémoire pouvait effacer les longs moments d’absence, abolir le passage du temps. J’allais à contre-courant tandis que se répétait un drame intérieur et que je continuais d’errer dans l’espace et le temps. «Je souffrais étrangement d’être, et de ne pas être», comme le confia Valéry à propos de lui-même. Plus tard, je repérerai dans la biographie de nombre d’artistes un moment de crise, une rupture, qui permet à ceux qui parviennent à la surmonter de puiser une force, de découvrir le vrai chemin vers soi et, pour certains, d’entrevoir quel est leur destin.

extrait : «Le Livre intérieur, 16 écrivains racontent», Le Castor astral, collection L'Atelier imaginaire, 2013.

Lieu de vie

Île-de-France, 75 - Paris

Types d'interventions
  • Ateliers d'écriture en milieu scolaire
  • Rencontres et lectures publiques
  • Résidences
  • Rencontres en milieu scolaire