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Les écrivains / adhérents

Michel Manière

Roman
photo Michel Manière

Si je me retourne sur les quelques trente ans de mon existence officielle d'auteur, je vois nettement trois périodes.
La première, que j'appellerais celle des romans-romans, ou roman innocents (1976-1986 : Le Sexe d'un Ange, Les Nuits parfumées du Petit Paul, Du Côté du Petit frère, La Fatalité célibataire, Le Droit chemin).
La deuxième, celle des récits autobiographiques (1992-1995 : Ceux qui l'ont aimé, Vous souvenez-vous de moi ?)
La troisième, celle des romans troublés (à partir de 2005 : Une femme distraite, Une Maison dans la nuuit, Parfois, dans les familles).
Autrement dit :
Une période où, affranchi des interdits du Nouveau Roman qui régnait sur l'Université à l'époque de mes études, j'ai répondu sans me poser d'autre question que celle de la justesse du ton, à la nécessité intérieure qui m'animait. Ce qui a donné, pour le lecteur, des romans linéaires commandés par le parcours inéluctable d'un personnage en crise, et, pour l'auteur, la découverte progressive de son terreau d'écriture: emprise d'une enfance dominée par la religion (catholique), attachement excessif à la mère, désarroi d'un âge adulte avec pour armes dérisoires l'autodestruction et le sexe.
Une période imposée par l'expérience vécue: la perte de l'être aimé, qui rend toute entreprise romanesque dérisoire, ramène l'écriture au respect scrupuleux du vécu... et m'ouvre à l'écriture des autres. C'est à ce moment-là que je commence à animer des ateliers d'écriture.
La période actuelle, de reconquête d'une foi nouvelle en la fiction, pour des romans plus libres, plus ouverts, moins linéaires et moins psychologiques, le moteur en étant désormais extérieur au personnage.

Bibliographie

Littérature générale
éditions Flammarion
– Le Sexe d'un Ange, roman, 1976
– Les Nuits parfumées du Petit Paul, roman, 1977
– Du côté du Petit Frère, roman, 1980

éditons Hachette POL
– La Fatalité célibataire, Trois histoires exemplaires plus Une, 1982

éditions POL
– Le Droit chemin, roman, 1986
– A ceux qui l'ont aimé, récit, 1992
– Journal d'un silence, 2017

éditions Julliard
– Vous souvenez-vous de moi ?, récit, 1995

éditions Hachette
– Regrets éternels, nouvelle, 1997, dans un livre collectif Enfants terribles.

éditions Grasset
– Une femme distraite, roman, 2005
– Une maison dans la nuit, roman, 2007

éditions du Seuil
– Parfois, dans les familles, roman, 2009
– L'homme qui n'y croyait pas, roman, 2011

Extraits

Extrait de Parfois, dans les famille, à paraître en 2009 au Seuil

On entendait que les bouches et les couteaux sur les assiettes. C'était tellement sinistre qu'au bout d'un moment papa s'est levé pour allumer la télé. C'était la blonde à la grande bouche, celle qui nous regarde d'un drôle d'air. Maman a changé de chaise pour lui tourner le dos. Je sais ce qu'elle pensait: elle a rien à faire chez nous celle-là quant on est tristes. Moi j'étais quand même bien content qu'on entende plus le silence. Juliette a dit: – Je veux pas de dessert, j'ai du travail, et puis demain je me lève, bonsoir. Papa a soupiré. Il était pas d'accord qu'elle aille au lac avec Irène. – Irène mon oeil, il avait dit quand elle avait demandé. J'ai mangé ma compote et j'ai dit: – Faut que j'aille soigner Robert, bonsoir papa, bonsoir maman. – Bonsoir mon Paulo. Elle a soulevé mes cheveux pour m'embrasser la tête. Couche-toi vite et n'éteinds pas trop tard. J'ai fait pipi puis je suis monté.

Oui, c'est cette timidité qui rend Juliette furieuse. Car elle sait, elle le sait en toute conscience, que cette timidité est son oeuvre à elle, tout comme est son oeuvre cette chose grotesque qui au même moment déforme le short du garçon au niveau de la braguette. Cette chose qui a sa vie propre, son audace propre, son orgueil. Cette chose, qui, à dire vrai, n'est pas grotesque en elle-même, cela aussi elle le sait, sait qu'elle pourrait aisément s'accommoder de cette chose, qu'elle pourrait même l'aimer, oui, ce serait de l'amour, mais qu'il faudrait pour qu'elle l'aime, qu'elle soit en quelque sorte seule à seule avec elle, sans lui entre cette chose et elle – lui avec sa jolie figure et ses hésitations, avec sa bête jeunesse et sa timidité. Ainsi sa colère, se nourrissant d'elle-même, finit-elle par lui souffler cette effronterie, cette perversité: de faire voler d'un geste la robe légère sous laquelle elle est en bikini : – On va se baigner ? Puis d'attendre sadiquement qu'il montre, en en faisant autant avec son short, si oui ou non il est à la hauteur de ce qui, pour sa honte, s'y exhibe si crânement !

Lieu de vie

Île-de-France, 75 - Paris

Types d'interventions
  • Rencontres et lectures publiques
  • Ateliers d'écriture en milieu universitaire
  • Rencontres en milieu universitaire