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Les écrivains / adhérents

Jean-Pierre Castellani

Essais / Récits
photo Jean-Pierre Castellani

Jean-Pierre Castellani est né à Ajaccio. Mes parents : Jean-Mathieu Castellani (né à Paris en 1909) et Julie Siméoni (née en 1911 à Toulon), tous deux instituteurs formés en Corse, sont arrivés en Algérie en septembre 1932. Ils étaient d’origine modeste : le père de Jean-Mathieu était un simple employé de Banque à Paris et Julie était orpheline, adoptée comme pupille de la nation en 1919 sur décision du Tribunal Civil d’Ajaccio. J’ai fait mes études à l’université d’Alger et de Poitiers. En 1962, je me suis installé en France. Agrégé de l’université, Professeur émérite à l’université François Rabelais de Tours, j’ai aussi été chargé de cours à l’université de Corte de 1987 à 2009. Je suis membre du Conseil d’administration de l’association Corsica Diaspora. En 1997, j’ai fondé les Semaines du cinéma espagnol, à Ajaccio. Spécialiste dans la littérature de l’espace autobiographique, je suis vice-président de la SIEY (Société Internationale d’Etudes Yourcenariennes) et membre de l’AICL (Association Internationale des critiques littéraires, siège en Italie). J’ai publié de nombreux ouvrages dans le domaine de la langue et de la littérature française, de la production romanesque espagnole contemporaine et dans le discours de presse et de cinéma.

Bibliographie

Auteur
– Décrypter la presse écrite espagnole, Collection Major, PUF, Paris, 2000.
– Goodbye Rabelais ! figures libres & Yourcenar, Almodóvar et Umbral… Editions EST (Samuel Tastet), Paris, 2006.
– Je, Marguerite Yourcenar, d’un « Je » à « L’Autre », Editions EST (Samuel Tastet), Paris, 2011.

Co-auteur ou coordinateur
– Pièges et difficultés du français, Nathan, 1982
– Orthographe (Apprentissage), Nathan, 1989
– Guide de Lecture 6/5, Flash, A. Colin, 1991
– Guide de Lecture 4/3, Flash, A. Colin, 1992
– Marguerite Yourcenar, une écriture de la mémoire, en co-direction, Sud, 1990
– Marguerite Yourcenar et l'Art, l'Art de Marguerite Yourcenar, en co-direction, SIEY, Tours, 1990
– La langue de l’autre ou la double identité de l’écriture, en co-direction, Littérature et nation, n°24, Université de Tours, 2001
– « El embrujo de Shangai » : la novela de Juan Marsé y la película de Fernando Trueba, coordination, Lectures d’une ɶuvre, Editions du Temps, 2003
– « Goya en Burdeos » de Carlos Saura, coordination, Lectures d’une ɶuvre, Editions du Temps, 2005
– Goodbye Rabelais ! figures libres & Yourcenar, Almodóvar et Umbral… Editions EST (Samuel Tastet), Paris, 2006.
– Texte et image dans les mondes hispaniques et hispano-américains, série études hispaniques, XX, ed. Jean-Pierre Castellani-Mónica Zapata, Presses Universitaires François-Rabelais, Tours 2007.
– Une enfance corse, coordination avec Leila Sebbar, Bleu-autour, 2010.
– Mémoire(s) de Corse, coordination avec Jean-Jacques Colonna d’Istria , Colonna éditions, 2012.

Divers
– Un texte Le silence dans Ma mère, ouvrage collectif coordonné par Leila Sebbar, Chèvre-feuille étoilée, 2008
– Coordination du numéro spécial de la revue espagnole Intramuros (N° 32) consacré à Francisco Umbral. Novembre 2010.
– Traduction en langue espagnole de la pièce 20 Novembre de Lars Norén. Création à Valladolid en janvier 2012.
– Un texte « Mis infancias » dans la revue Intramuros (N°36, 2013), spécial Mi Infancia.

Extraits

Le silence
Tu es resplendissante sur cette photo prise à Ajaccio en 1931, sur la fameuse Place du Diamant, rebaptisée Place De Gaulle dans les années 70 mais que personne n’appelle ainsi aujourd’hui, ironique revanche du destin, pour moi… tu marches en compagnie de deux de tes amies. Tu es la plus belle, la plus élégante, du moins à mes yeux, bien que vêtue sans ostentation, tu respires la joie de vivre, l’enthousiasme, la franchise. Tu ressembles à ces actrices de cinéma de l’époque avec ce beau chapeau. Tu es, comme dirait Francisco Umbral, ma Greta Garbo…
Et surtout, au verso de cette photographie, ton fiancé, c’est-à-dire, mon futur père, a écrit ces simples mots : « Relizane, reçu le 3/12/1931 ».Encore aujourd’hui, je retrouve souvent, par hasard, des commentaires de mon père, au dos de documents divers ; ils sont précieux pour comprendre son ou votre intimité. Ils sont émouvants, comme des confidences faites à travers le temps, des remarques jamais émises du temps qu’il était vivant. Comme un dialogue qui continue, miraculeusement…au-delà de sa disparition en 1983.
C’est donc une photo que tu lui avais envoyée, en décembre 1931, de Corse, à lui qui vivait alors en Algérie, ou plus exactement à Relizane où il exerçait le beau métier d’instituteur. Je devais comprendre assez tard pour quelles raisons il s’y trouvait. Il y avait passé trois ans, entre 1920 et 1923, enfant, recueilli par un oncle, à la mort de sa mère. Au fond, vous étiez deux orphelins qui se rencontraient et s’unissaient…
Et voilà que je reconstitue, 77 ans, après le puzzle de ta vie dont je me rends compte aujourd’hui que je n’en connais que des bribes, des traces, parce que tu ne nous as jamais parlé, à mes frères et à moi, de ton enfance, ou même de ton adolescence.
Tu étais le silence, tendre, attentionné, attentif mais discret, humble, doux, tu ne te plaignais jamais ni te ne vantais de rien. Cela ne se faisait pas à l’époque, et encore moins dans une famille profondément corse où la femme était, d’abord, une épouse et une mère, même si elle était comme toi, au service des autres et non une bavarde qui racontait et étalait, avec complaisance, sa vie.
(Le silence dans Ma mère, ouvrage collectif coordonné par Leïla Sebbar, Éd. Chèvre-feuille étoilée, 2008.


Avant-Propos
Nous sommes le 6 mars 1980. Je dois donner une conférence sur L’Itinéraire de Marguerite Yourcenar devant un amphithéâtre de l’université de Valence, en Espagne. Comme tous les soirs, la salle est pleine d’une foule d’auditeurs fervents. Le Conseiller culturel français à Madrid, grand lecteur de Yourcenar a élargi ce qui devait être une mini-tournée ibérique, consacrée à un auteur connu des lettres françaises, comme j’en ai fait déjà plusieurs, la transformant en un véritable marathon dans les principales villes de la Péninsule : Séville, Saragosse, Salamanque, Madrid, Valladolid, Barcelone, et maintenant Valence. Informé de l’événement, j’apprends juste avant de commencer mon exposé à 20 heures que l’Académie française vient d’élire Yourcenar en son sein. C’est la première fois que la savante assemblée accueille une femme, cela constitue un fait historique qui a un écho dans le monde entier et, en particulier, dans l’Espagne d’alors, plongée dans l’ébullition de la movida des années 80. Je l’annonce au public qui applaudit à tout rompre. La conférence et le débat qui la clôture traditionnellement, toujours mouvementé avec Yourcenar, dont la personnalité et l’œuvre provoquent les passions, se déroulent dans une atmosphère électrique.
Cela fait trente ans…
Je ne sais pas encore que je viens de donner le coup d’envoi d’une aventure extraordinaire qui va bouleverser ma vie paisible d’universitaire et me conduire à faire le tour du monde en suivant précisément le nomadisme de mon auteur préféré. Amateur éclairé des textes alors publiés par Yourcenar, je vais me transformer, au fil des ans, par une série de hasards, notion qui plaisait tant à Yourcenar, en ce que la critique scientifique appelle pompeusement un spécialiste de l’œuvre. Et dans son cas, comment séparer les textes de sa personne si singulière ?
Et que d’expériences accumulées au long de ces années, de ces rencontres, que de souvenirs ! En m’occupant principalement du “je” de Yourcenar, je construisais aussi ma propre vie, en la conduisant sur des chemins que je n’avais pas prévus dans une carrière universitaire programmée pour d’autres choses. Que de souvenirs peuplent ma mémoire : outre les amphis étudiants de ma propre université ou d’autres en Europe, ce qui est, somme toute, assez banal pour un enseignant, des lieux si curieux, improbables comme on dit de nos jours, où je parlais de Yourcenar : au milieu des livres dans de vieilles librairies à Bologne ou à Parme en Italie, dans le salon cossu du Musée Malba à Buenos Aires, dans une prison à Málaga en Espagne, devant les adhérents cultivés des associations Guillaume Budé ou des Rotary Clubs, en France, aussi bien que dans des cafés littéraires du quartier de l’Alfama, à Lisbonne.
C’est ainsi que j’ai parlé de Yourcenar un peu partout dans le monde : France, Italie, Espagne, Allemagne, Portugal, Irlande, Royaume-Uni, Roumanie, Grèce, Chypre, Algérie, Tunisie, Japon, Argentine, Colombie, Brésil. Comment oublier cet interminable voyage en train pour Pordenone, dans le Nord de l’Italie, où je me retrouvai, avant de donner ma conférence, dans le même compartiment qu’une sage jeune fille qui était plongée dans les Mémoires d’Hadrien et à laquelle je n’osai pas dire que ma sacoche contenait un exposé sur ce livre ? Comment oublier ces causeries en Sicile, baigné du parfum des oranges qui s’étalaient sur tous les présentoirs des marchés de rue, sortes de cathédrales éclairées dans la nuit ? Comment oublier les vieilles comtesses de l’association culturelle franco-italienne de Venise dont la directrice, personne assez extravagante mais cultivée, descendante de Ravel, me disait qu’il fallait leur parler fort car elles étaient sourdes…
Je n’oublierai jamais ces 200 élèves studieux et attentifs du Collège National de Buenos Aires qui me posèrent mille questions pertinentes. Ni les étudiants en journalisme du grand quotidien de Mendoza en Argentine. Non plus que les fidèles des causeries littéraires de la merveilleuse Bibliothèque municipale d’Ajaccio, avec ses vieux pupitres datant de l’époque du Cardinal Fesch, ou, au Centre Culturel français, à Alger, cet étudiant aveugle qui m’avoua fièrement lire Yourcenar en braille…
Toutes ces images se mélangent aux mots de Yourcenar, lus et relus inlassablement à la recherche d’une idée, d’un jugement, d’une vérité. Ah cette édition Folio des Mémoires d’Hadrien qui part en lambeaux et dont je ne veux ni ne peux me séparer, qu’aucune édition glacée en books ne pourra remplacer !
(Je, Marguerite Yourcenar, d’un « Je » à « L’Autre », Editions EST (Samuel Tastet), Paris, 2011)

Lieu de vie

Centre-Val de Loire, 37 - Indre-et-Loire

Types d'interventions
  • Rencontres et lectures publiques
  • Rencontres en milieu universitaire
  • Ateliers / rencontres autres publics
  • Résidences
  • Rencontres en milieu scolaire