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Les écrivains / adhérents

Marie Cosnay

Roman
photo Marie Cosnay

Je vis à Bayonne au Pays basque, dans une maison aux camélias.
A deux pas de la Villa chagrin et de l’Adour.
Je travaille à Bidache, dans un petit collège.
Les adolescents et moi-même nous tentons de traduire Catulle, Virgile ou Ovide.
Nous n’y arrivons pas toujours mais nous sommes très heureux ensemble.
J’aime plus que tout avoir devant moi une journée immobile, sans rupture et sans projet.
Je ne sais pas si j’aborde des thèmes spécifiques dans les livres qui se fabriquent.
Je dirais plutôt que je cherche à donner des objets et une forme à ce qui existe en désordre et en image, quelque part, en moi, et qui me vient des livres que j’ai lus et aimés, des choses que j’ai vues, des gens et constructions qui me sont, par bonheur et hasard, venus.
Je tente d’apprendre le basque. Je ne suis pas douée pour les langues vivantes.

Je passe du temps à me renseigner sur les conditions de vie faites en Europe aux migrants. J’apprends les murs, les CRA, les fossés que construit l’Europe, ainsi que les pays voisins de l’Europe.
Je pense à ces lignes d’Imre Kertesz, écrites il y a plus de dix ans, dans Un autre : « La terreur claustrophobique de l’Europe occidentale donnera naissance à un nouvel Adolf Hitler, à la paranoïa de supériorité des inférieurs. Les détenteurs de richesses et du pouvoir autoriseront à nouveau l’avilissement total de la société, rien que pour « sauver les meubles », et finalement, au prix d’un nouveau totalitarisme, de nouvelles catastrophes sociales, ils réussiront à survivre ».

Septembre 2014-juillet 2015 : Résidence Île-de-France à l'Accueil de jour Agora Emmaüs, Paris 1er. remue.net/spip.php?rubrique757 & www.m-e-l.fr/fiche-residence.php?id=16

Photo : Michel Durigneux

Bibliographie

Publications
– Que s’est-il passé, Cheyne éditeur 2003
– Adèle la scène perdue, Cheyne éditeur 2005
– Villa Chagrin, Verdier, 2006
– Déplacements, Laurence Teper, 2007
– Le chemin des amoureux, Le bruit des autres, 2007
– André des Ombres, Laurence Teper, 2008
– Trois Meurtres, Cheyne éditeur, 2008
– Les Temps filiaux, Ateliers in8, 2008
– La Langue maternelle, Cheyne éditeur, 2010
– Comment on expulse, Le Croquant, 2011
– L'allée du bout du monde, Publie.net, 2011
– A notre humanité, Quidam éditeur, 2012
– Des Métamorphoses, Cheyne éditeur, 2012
– La Bataille d'Anghiari, L'Or des fous, 2013
– Le Fils de Judith, Cheyne, 2014
– Cordelia la guerre, éditions de l'Ogre, 2015
– Sanza lettere, éditions de l'Attente, 2015
– Vie de HB, Nous, 2016
– Jours de répit à Baigorri (Créaphis, 2016)
– Aquerò (éditions de l'Ogre, 2017)

Textes parus en revues
Petite, Arpa, Présages, La Polygraphe, Le Nouveau recueil, NR4728
– Traduction d'Hypsipyle, d'Euripide, Fario N°8

Traductions
– Phaéthon, Euripide.
– Hypsipyle, Euripide.
– Antigone, Sophocle.
– Livres X, XI, XII des Métamorphoses d’Ovide.
www.musagora.education.fr/ovide/intro.htm

Extraits

Extrait, André des Ombres, Laurence Teper, 2008, pages 165-167

L’avion fut abattu ce jour-là. Quand il voit chez Alexis d’Abyssinie la carte postale édition Reboulet, André retrouve mémoire du capitaine, des flammes qu’il faut mesurer, des épaules du garçon appuyées contre les siennes. Quand on marche, s’arc-boute ou rampe dans la galerie, on déplace s’il est possible jambes ou tronçons de corps, pour ne pas piétiner. Parfois pressé on marche, écrase. Ce jour-là dans la tranchée au Bois le Prêtre il y avait mieux que le jeu de manille et les paysages qui s’allongeaient pour finir aux barbelés sous le ciel couvert, dentelé au loin. André de courte taille logeait ses jambes devant lui. De petits panaches de fumée s’élevaient, les tirs d’artillerie répondaient aux tirs d’artillerie. Un détachement était sorti au plus près des positions ennemies. La prochaine fois, pensait André qui fumait silencieux, coude à coude, puis ne pensait plus. Le bruit est nouveau. Les hommes se dressent, André sur les épaules du premier qui le saisit, on voulait s’élever, voir plus haut alors même qu’on pensait qu’il fallait se coucher, battre en retraite et ne plus voir ni entendre. On regarda, stupéfait du bruit et des masses compactes et déliées, de l’acier et du vol, on était survolés, les uns criaient Un Taube, c’est ainsi, par le cri, quand André est au-dessus, pas plus grand que les autres, perché pourtant sur les épaules de l’un, peut-être Félix qui veille sur lui comme un frère, c’est par le cri qu’il sut, lui pour qui cela resta suspect nom et avion comme réalité. Taube ne voudrait plus jamais rien dire, si ce n’est, soudain, à Addis Abeba, une deuxième fois, quand il reconnut sur la carte postale l’avion à l’allure d’oiseau (et le bois et les corps défaits ou devinés des soldats allemands, à moins que ce ne fût l’ombre des ailes brisées, que l’on pouvait à son gré prendre, tant la prise était floue, pour les franges des arbres déchiquetés). L’avion était sur eux, puis un autre avion, et les cris redoublaient, Nieuport, cette fois l’avion était français, les mitrailleuses couvraient le bruit des voix, André songea à finir en plein vol ou ne songea pas, ce qui ne faisait pas de différence, l’avion allemand fit un écart, on apercevait encore quelque chose, l’avion allemand était touché, le Nieuport s’élevait, merveilleux, disparaissait, le temps passa identique à ce qu’il était, le Taube piquait du nez, virait, André lui-même dégringola, le Taube dessinait des courbes sous les huées, l’acclamation, après on s’arrachait, au lieu Chaufontaine, des débris de toile, Félix revint premier, on séchait sur les mains la poussière qui craquelait, étudiant la hauteur des flammes, le garçon frottait sa gabardine, tous étaient fatigués d’avoir rugi, clamé. André, la douceur lui faisait de petits signes, sur les flammes, épaule contre épaule, dans le récit de celui qui ne craignait pas les récits mais se promettait la mort pour un mot alors même que la mort, on lui marchait dessus. La chaleur était parfaite, mesurée. Le ciel se déchirait. Glissait d’entre-nuages un filet de sang gris, endormi André y puisait comme à la source d’une enfance, en campagne, ou aux bords de la Seine quand elle débordait, en 1910. La terre fraîchissait, André y dormait taille contre celle du camarade, il y faisait le rêve flou, venu de guerre et de combats qu’on ne voyait jamais (impossibles corps à corps, dents jamais serrées sur d’impossibles lambeaux de corps), de rester, dans une fente de terre creusée d’obus, enterré, sans un mot qui pût trahir le camarade ni l’effrayant bonheur du secret reçu. A chaque instant de nuit André entendait le bruit, plus vif que ceux des mitrailleuses, du cœur qui dans sa cage frappait, menaçant sans gravité, éternellement, d’en finir là, d’en finir avec le coup qui viendrait plus qu’avec le coup passé. Il sentait le front du camarade peser maintenant contre son épaule, le cœur frappait, le coup, toujours un autre, le sang dérivait, durait, quoiqu’à chaque instant du temps toute la vie ou l’âme ou le rendu de vie fût au bord de ses lèvres, prêt au dégorgement, cela va se répandre, il n’y a qu’un bref espace encore, un coup, peut-être celui-ci, qui vient.

Lieu de vie

Nouvelle-Aquitaine, 64 - Pyrénées-Atlantiques

Types d'interventions
  • Ateliers d'écriture en milieu scolaire
  • Rencontres et lectures publiques
  • Ateliers d'écriture en milieu universitaire
  • Rencontres en milieu universitaire
  • Ateliers / rencontres autres publics
  • Résidences
  • Rencontres en milieu scolaire