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Les écrivains / adhérents

Benoît Artige

photo Benoît Artige

Né en 1983, Benoît Artige vit et travaille en Île-de-France. Au quotidien, sa pratique de l'écriture s’entremêle à celles du dessin et du chant. Il est membre du comité de rédaction du collectif Remue.net. Il tient le blog leslignesfolles.blogspost.com.

http://leslignesfolles.blogspot.com
Bibliographie

Roman

Madeleine lit, La Part Commune, 2020

Série de micro-fictions

Figures libres, Remue.net, depuis 2018

Publications en revue

"Sous le vert", Teste n°38, mai 2020
"Un déjeuner sur l’herbe", Remue.net, avril 2018
"Les Archives italo-suisses du visiteur japonais" (images de Frédéric Khodja), Remue.net, 2016/2017
"Le Studio Shéhé>razade", Patchwork n°9-10, hiver 2016/2017
"Les bars", Journal de mes Paysages n°4, novembre 2016
"À chœur perdu", Paysages écrits n°27, juin 2016
"Faire son tri", Jef Klak n°3, été 2016
"Retour d’Oman", Journal de mes Paysages n°3, avril 2016
"La Mort des Incas", Patchwork"Je me dis souvent", Ce qui reste, 2015
"Contre-ut", Paysages écrits n°22, novembre 2014
"Saudades de Mazagão", Maroc : les Lettres portuaires, Riveneuve Continents, 20214
"La Montée des eaux", Nouvelles du Maroc, Casa-Express Àditions, 2013

Extraits

Extrait : Madeleine lit, La Part commune, 2020

Il avait fallu la transporter entière, car elle ne se démontait pas, et la hisser jusqu’au premier étage grâce à un système compliqué de poulies. Ils s’étaient mis à cinq pour la soulever et la manœuvrer, le père voulant absolument prêter main forte aux déménageurs – aide que ceux-ci n’avaient pas osé refuser même si elle s’était avérée aussitôt inutile – sous l’œil réprobateur de la mère, inquiet de l’enfant qui assistaient par la fenêtre ouverte à la très lente exhumation de ce cercueil hors-norme qui aurait pu contenir jusqu’à six corps couchés côte-à-côte et dont les vitres, vibrant à chaque crissement de cordes, renvoyaient de-ci de-là des reflets confus. Ça devait rentrer, ça rentrerait, c’était presque une question d’honneur pour le père qui se démenait comme un diable, jurant, soufflant, suant, se donnant en spectacle sous l’œil amusé des quatre colosses – deux postés sur le balcon, deux restés en bas – qui avaient fait mine d’écouter ses consignes – ne jamais contrarier les propriétaires de bibliothèque qui sont, avec les pianistes, d’une même espèce tatillonne et hystérique – avant de lancer les grandes manœuvres, avec des gestes rapides et sûrs et sans laisser paraître le moindre effort, faisant effectuer au meuble solidement harnaché, comme s’il s'était agi d’une chose très légère, une lente rotation dans les airs pour l'introduire et l’installer dans la maison, sans que la mère – secrètement, elle aurait souhaité que, par la maladresse de l’un des déménageurs ou à cause d’une corde rompue, le meuble se fracasse sur le sol, plutôt que de remplir, luisant, impeccable, énorme, la petite pièce qui lui était réservée – puisse constater sur sa surface le moindre petit éclat dû aux frottements contre le balcon ou contre les murs, ce que le père, en géomètre impitoyable, n’avait pas manqué de relever, une fois l’opération achevée : contrairement à ce que tout le monde pensait, la bibliothèque était rentrée, les mesures qu’il avait prises étaient les bonnes, au centimètre près.

Extrait : Henri Matisse, Figures Libres, Remue.net, 2020

Il appelait “Angèle, Angèle” – il avait encore égaré ses ciseaux – et Angèle accourait aussitôt, enchantée de ce jeu entre eux deux : elle cherchait par terre, sur le dessus des meubles – “mais non, Angèle, ils ne peuvent pas être ici” – et elle en profitait pour faire les poussières, ranger les papiers en désordre - “Coco doit savoir où ils sont, lui qui observe tout” –, interrogeait le perroquet – et le Maître riait : “Allons, Angèle, cherchez encore.” Et pendant qu’Angèle cherchait, le Maître attrapait pêle-mêle avec ses doigts agiles la lumière, les formes, les couleurs, il taillait dans le vif les proies que son œil avait capturées : le sourire d’Angèle, le rouge de ses lèvres, la blancheur de ses dents, le vert acide du perroquet, la courbure de son bec, les ombres tranchées sec par les rayons du soleil, les fleurs du jardin qui débordaient du cadre de la fenêtre ouverte. Le Maître s’amusait comme un enfant : il avait enfin l’âge pour ça.

Ma bibliothèque

Blaise Cendrars, Jean Echenoz, Julien Gracq, Marie-Hélène Lafon, Pierre Michon, Francis Ponge, W.G. Sebald, Leonardo Sciascia, Natsume Sôseki, Stendhal, Kateb Yacine...

Lieu de vie

Île-de-France, 95 - Val-d'Oise