Contenu | Navigation | Politique d'accessibilité | Crédits Lettre internet

Les écrivains / adhérents

Régine Detambel

Poésie / Roman / Nouvelle / Essais / Jeunesse / Contes
photo Régine Detambel

Régine Detambel est née en Moselle en 1963. Elle a publié son premier ouvrage aux éditions Julliard, en janvier 1990, sous l’égide de Christian Bourgois et Elisabeth Gille. Elle a publié des romans (La Verrière, Gallimard, 1996 ; La Chambre d'écho, Seuil, 2001 ; Son corps extrême, Actes Sud, 2011), des textes brefs (Graveurs d'enfance, Folio, 2001), des essais (Petit éloge de la peau, Folio, 2007 ; Le Syndrome de Diogène, éloge des vieillesses, Actes Sud, 2008), ainsi que des ouvrages en ligne chez publie.net (Les Corpulents). Ses romans, traduits dans une dizaine de langues, témoignent de l’attention portée aux corps aimants, aux corps extrêmes, aux corps sportifs, souffrants, vieillissants ou violentés.

Chevalier des Arts et Lettres, Régine Detambel est également lauréate de la bourse Cino del Duca et du prix Anna de Noailles de l’Académie française. Elle a reçu le Grand Prix SGDL Magdeleine-Cluzel pour l’ensemble de l’oeuvre en 2011.
Elle vit près de Montpellier.

Thèmes fondamentaux
Les ouvrages de Régine Detambel interrogent le corps et sa mémoire, au travers des expériences sensibles de la détresse et de la maladie, et fait du processus de guérison un moteur romanesque. Elle propose une élaboration littéraire du corps et des expériences corporelles (Son corps extrême, Actes Sud, 2011).
Opéra sérieux (Actes Sud, 2012) interroge le mystère de la voix chantée et sa subtile symbolique.
Kinésithérapeute et attentive aux sensations du corps interne, comme au nouage du langage au corps, elle a fait de la littérature un mode de vie, et de l'écriture, tout comme de la marche, un moyen de transformation de soi, parfois thérapeutique, mais le plus souvent affolant, déréglant, en tout cas bouillonnant d'énergie.
Le lien entre littérature et arts plastiques, ainsi que sa fréquentation des ateliers de plasticiens, ont nourri son approche des propriétés artistiques de la peau et du corporel en général (Petit éloge de la peau, Gallimard, 2006).
L'enfance au corps apprenant, au regard voyant et hypersensible, lui a inspiré notamment La lune dans le rectangle du patio (Gallimard, 1998)
Une réflexion poussée, étayée par le recueil de nombreux témoignages en milieu institutionnel, l'ont poussée à s'investir dans le problème des vieillesses. L’essai intitulé le Syndrome de Diogène, éloge des vieillesses (Actes Sud, 2008) pose les enjeux de cette question de société devenue brûlante, tandis que Noces de Chêne (Gallimard, 2008) explore sous la forme romanesque la sexualité encore taboue et décriée du grand âge. Noces de chêne a été sélectionné pour le Prix Chronos / Fondation Nationale de Gérontologie 2010. Régine Detambel a été marraine nationale de la Semaine Bleue 2008.
Régine Detambel est également conférencière. Sa formation de masseur-kinésithérapeute lui permet d’aborder notamment la thématique du corps. Elle propose des conférences sur des sujets variés : « Vieillesse créatrice », « La Peau racontée », « L’écriture en mouvement », «Bibliothérapie ou comment les livres prennent soin de nous»…

http://www.detambel.com
Bibliographie

Fictions
– Trois ex, roman, Actes Sud, 2017
– La Splendeur, roman, Actes Sud, 2014
– Martin le bouillant, Publie.net, 2013
– Opéra sérieux, roman, Actes Sud, 2012
– Son corps extrême, roman, Actes Sud, 2011 - Grand Prix de la SGDL 2011
– Sur l'aile (Mercure de France, 2010)
– 50 Histoires Fraîches (Gallimard, 2010)
– Noces de chêne (coll. « Blanche »), Gallimard, 2008.
– Notre-Dame des Sept Douleurs (coll. « Haute Enfance », Gallimard, 2008.
– Pandémonium (coll. « Blanche »), Gallimard, 2006.
– Mésanges (coll. « Blanche »), Gallimard, 2003.
– La Chambre d’écho (coll. « Point Seuil » n°1062), Le Seuil, 2001.
– La Patience sauvage (coll. « Blanche »), Gallimard, 1999.
– Elle ferait battre les montagnes (coll. « Blanche »), Gallimard, 1998.
– La Verrière (coll. « Blanche » & « Folio » n°3107), Gallimard, 1996.
– Le Ventilateur (coll. « Blanche ») , Gallimard, 1995.
– Le Jardin clos (coll. « Haute Enfance »), Gallimard, 1994.
– La Lune dans le rectangle du patio (coll. « Haute Enfance », Gallimard, 1994.
– Le Vélin, Julliard, 1993.
– La Quatrième orange, Julliard, 1992.
– Le long Séjour, Julliard, 1991.
– La Modéliste, Julliard, 1990.
– L’Orchestre et la Semeuse, Julliard, 1990.
– L’Amputation, Julliard, 1990.

Textes brefs
– Les Enfants se défont par l’oreille, Fata Morgana, 2006.
– Blasons d’un corps enfantin, Fata Morgana, 2000.
– La Ligne âpre, Christian Bourgois, 98.
– Album (coll. « Petite Bibliothèque du XXe siècle »), Calmann-Lévy, 1995.
– Graveurs d’enfance (1ère édition Christian Bourgois, 1993), Folio n°3637, 2003.
– Les Ecarts majeurs, Julliard, 1993.

Essais
– Les livres prennent soin de nous. éditions Actes Sud, 2015
– Le Syndrome de Diogène, éloge des vieillesses, Actes Sud, 2008.
– Petit éloge de la peau, Folio n°4482, 2007.
– Bernard Noël, poète épithélial, Jean-Michel Place, 2007.
– L’Ecrivaillon ou l’enfance de l’écriture, Gallimard, 1998.
– Colette. Comme une flore, comme un zoo, Stock, 1997.

Poésie
– Icônes, Champ Vallon, 1999.
– Emulsions, Champ Vallon, 2003.

Pour la jeunesse
– L’Arbre à palabres, Flammarion/Père Castor, 1997
– Ernest Poustoufle danse la javanaise, Flammarion/Père Castor, 1998
– Les Massachusetts prennent la plume, Gallimard Jeunesse, 1997
– Premier galop, Gallimard Jeunesse, 1999
– Ecoute-moi, Bayard Jeunesse, 2000
– Jalouse, Bayard Jeunesse , 2003
– La Comédie des mots, Gallimard Jeunesse, 2004
– La Fille mosaïque, Les 400 coups, 2008
– Des petits riens au goût de citron (Thierry Magnier, 2008)

Ouvrages numérisés
– Son corps extrême, Actes Sud Téléchargeable, 2011
– Sur l'aile, Mercure de France, 2010
– Blasons d'un corps masculin, Editions publie.net, 2008
– Les corpulents, Physique des corps graves Editions publie.net, 2008
– Décousures, Editions publie.net, 2008

Extraits

Extrait de Opéra sérieux, roman, Actes Sud, 2012
"Il n’est de voix divine que de femme. Et même en ce siècle de putréfaction de la métaphysique, la petite n’en est jamais privée parce que les maîtresses du ténor Marsch, toujours le chant aux lèvres, ne cessent pas de lui faire entendre la partition paradisiaque qui berce les enfants dans l’unique membrane des ventres, son toucher immatériel, son art d’effleurer, son contact plus léger qu’une tangence. Nuit et jour la maison résonne des sons minces et graciles de leur voix de tête penchée sur le petit lit, que la gosse s’empresse de convertir en l’appel fascinant du ventre de la morte, sachant bien qu’elle joue avec le feu, les petits enfants sont des risque-tout, toujours sur le fil du délicieux rasoir de se perdre dans des retrouvailles perpétuelles avec le Ventre, de s’enclore de nouveau, de se diluer, de s’abolir dans les vibrations qui viennent de la gorge comme d’une poche ardente.
De ce côté-là, impossible de trouver plus cuisant et plus accueillant à la fois que la berceuse absurde et effrayante du chant de mort d’Isolde. Le coeur de la petite se met à battre dans sa tête, elle est saisie d’une sorte de vertige, sa bouche s’entrouvre sur ses incisives encore dentelées, et en même temps une énorme tranquillité. La chambre s’obscurcit, elle est heureuse comme si elle était déjà morte. Son petit lit, la fenêtre, le coffre à poupées, le chien Zapf, elle ne les voit pas de ses yeux, c’est une voix, une voix douloureuse et très haute qui suscite en elle ces images, une voix captivante où il n’y a rien à comprendre, dont il n’y a rien à conclure.
Le temps ne passe plus. Le temps est figé. La petite s’est dessiné une montre sur le poignet. Le temps égrène des minutes de chair pure. Car la voix qui monte de ses fonds a été créée pour altérer, séduire, empoisonner, pour tuer sans laisser de traces. Elle la fait tomber à genoux avec un coup au coeur, et malgré tout pleurant de pures larmes de plaisir insensé et de joie."


Extrait de Son corps extrême, roman, Actes Sud, 2011
"On ne s’éveille pas vierge d’un coma. Même si on a l’impression, un temps, que tout est blanc, il y a eu les cauchemars. Les démons hantent le silence et s’en nourrissent, ils sont la face vénéneuse des choses dont on avait si peur dans la chambre d’enfant, ils sont l’ombre de l’armoire, ils sont la tache de moisi sur la toile de Jouy qui, dans la presque obscurité, avait l’air d’une tête de mort, ils sont des âmes en peine et des spectres condamnés à une course désordonnée et éternelle. On ne s’éveillera plus jamais vierge. Les plis sont marqués partout. La preuve, c’est qu’on n’a pas toute la vie à retraverser quand on rouvre les yeux, un beau matin, dans un lit surélevé et muni de manivelles commodes. On n’a pas grand-chose à passer en revue, excepté ses abattis peut-être. Mais le fait d’être femme, le fait d’être mère, le fait de se demander si on est folle ou saine, tout revient aussitôt, le fardeau, le fagot, le paquet de souvenirs mouillés comme du linge lourd lui reviennent en pleine poire. Alice sait déjà tout, les scandales sont restés des scandales, les bonheurs sont toujours lumineux. Rien de changé. Rouvrir les yeux sur un matelas à eau de quarante centimètres d’épaisseur n’a créé aucun court-circuit déroutant. Et bien que son existence ait été largement éventrée et retournée par l’événement, Alice appartient toujours au même règne, à l’embranchement souhaité, pointe dans la classe idoine, évolue dans l’ordre, la famille, le genre et l’espèce ad hoc. Elle n’a pas eu droit à du neuf. Elle a remis sa vieille vie, d’occase, et replantera ses pieds dans les mêmes ornières. Rien n’a fait surgir de son être psychique des combinaisons fantastiques ou subtiles, elle se retrouve comme devant, déjà bouleversée, déjà infiniment angoissée, avec la peur et la rage au ventre, qui déploient leurs fastes et hissent leurs drapeaux. Elle s’éveille donc seule, David a disparu. Pour les différends, du moins, ils se sont toujours bien entendus et Alice ne perd rien à émerger dans cette réalité-là, avec pour seul nuage une poche de glucose au-dessus de sa tête et pour tout roulement de tonnerre le rire bête et bienfaisant de la famille banale qui visite sa voisine de chambre. Elle a la tête effroyablement lourde, gourde, elle est toujours en retard d’une réplique et son intelligence traîne derrière elle, égarée quelque part dans l’épave de la voiture ou sous le lit ou dans le tiroir de la table de chevet avec les protège-slips, un miroir inutile et des sucrettes. Elle somnole dans ce monde complet, ouaté et glougloutant. Ses pensées forment une matière légère, alvéolée. Et le vide apparent dans son crâne tient à l’allongement inouï des temps de pose entre deux réflexions, si bien que chacune de ses journées se love dans une seule image qui suffit à la condenser. Les heures se remplissent d’elles-mêmes d’une sorte de matière sans valeur, de billes de polystyrène, de bulles de plastique qui n’ont ni goût ni couleur. L’extrême de l’allègement. Alice jouit du bonheur de se fondre dans la masse, de n’avoir plus à décider du bien et du mal. Aubaine que d’être dépouillée de la pénible tâche de penser, libre du carcan des conventions et des manières, ne répondant rien quand on lui parle, n’ouvrant pas la bouche quand on lui donne à manger. Le vide est un baume aux tourments de soi. Une terrible et merveilleuse dispense d’humanité".

Lieu de vie

Occitanie, 34 - Hérault

Types d'interventions
  • Rencontres et lectures publiques
  • Rencontres en milieu universitaire
  • Ateliers / rencontres autres publics
  • Résidences