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Les écrivains / adhérents

Jean-Louis Crimon

Roman
photo Jean-Louis Crimon

Jean-Louis Crimon est né à Corbie, Picardie, en 1949. Son dernier roman, "Du côté de chez Shuang", a été publié à la rentrée littéraire 2014. Il l'a rêvé et composé en Chine, en septembre 2011, pour ses étudiants de l'Université Normale du Sichuan, à Chengdu, où il a enseigné la conversation française pendant un semestre. Le roman est une balade poétique et politque dans la Chine contemporaine. Roman dédié à Liu Xiabo, Prix Nobel de la Paix 2010. Mort le 13 juillet 2017, d'un cancer du foie.

En 2001, son premier roman "Verlaine avant-centre" avait été salué par Bernard Pivot. Ont suivi "Rue du Pré aux chevaux" et "Oublie pas 36".

Enfance dans une famille où il n'y avait pas de livres. Juste un Missel, le livre de messe. Enfance déterminante: " Les seuls livres que j'ai pu lire appartenaient à la bibliothèque de l'Ecole Primaire de mon village, Contay, mon Combray à moi. "Verlaine avant-centre" et "Rue du Pré aux Chevaux", mes deux premiers romans, sont nés, vraiment, de cette enfance particulière, dans une famille que ma mère aimait à qualifier de "modeste", pour ne pas dire "pauvre". Pauvres, nous l'étions, mais très tôt, je me suis senti riche d'autre chose. C'est pour ça que je me suis dit, l'année de mes 9 ans, que plus tard, quand je serai grand, je serai écrivain."

Jean-Louis Crimon est d'abord, fin des années 70, professeur de philosophie, puis journaliste, presse écrite et radio. Entre 1992 et 1995, il habite Copenhague, au Danemark, où il est le correspondant permanent de Radio France pour les pays scandinaves et les pays baltes.

En 2010, il tire un trait sur 30 ans de journalisme et devient bouquiniste. Vieux rêve d'ado. Façon aussi de rendre à la Seine tous les bonheurs de lecture que la Seine lui a donné. De 2010 à 2013, il amarre ses quatre boîtes vertes, quai de la Tournelle, à Paris. Crée son blog "Journal du bouquiniste", pour partager, au jour le jour, cette expérience de "Libraire de plein air". Blog devenu depuis le 1er Janvier dernier le lieu de publication de sa "Lettre à moi-même". En ce siècle 21, où l'on ne s'écrit plus de "vraies lettres", Jean-Louis Crimon décide de s'écrire, chaque jour, une lettre qu'il s'adresse à lui-même. Manière de revisiter le journal intime sans le "Je". Même si le "Je" est, bien sûr, dans le "Tu".

http://www.crimonjournaldubouquiniste
Bibliographie

– Je me souviens d'Amiens, roman, Le Castor Astral, 2017.
– Du côté de chez Shuang, roman, Le Castor Astral, 2013.
– Renaud raconté par sa Tribu, avec Thierry Séchan, L'Archipel, 2006.
– Oublie pas 36, roman, Le Castor Astral, 2006.
– Renaud, Librio Musique, 2003.
– Rue du Pré aux Chevaux, roman, Le Castor Astral, 2003.
– Verlaine avant-centre, roman, Le Castor Astral, 2001.
– Les gants d'Andersen, nouvelle, éditions Sansonnet, 1998.

Extraits

Extrait de "Verlaine avant-centre" :

"Aujourd'hui encore je me demande si ce qui me rend le plus malheureux, c'est de ne pas savoir qui de nous trois a eu le premier l'idée d'inventer la vache bleue, ou bien si c'est d'avoir seul pressenti que l'été de la vache bleue ne reviendrait plus jamais. Il faut seulement se faire une raison: la vache bleue s'est enfuie pour toujours à l'orée de mes 9 ans. Elle a sauté l'enclos magique des rituels de notre enfance. Cela tient de l'irréversible et de l'irréparable. Que j'en prenne conscience quarante ans plus tard, le jour où la maison de Contay est en vente, ne m'aide en rien à accepter l'inacceptable.
L'été de la vache bleue évanoui à tout jamais dans le marais de la Butresse, c'était une forme de mort, comme si ma première vie s'achevait à la fin de cet été-là. Le travail de deuil prendrait l'existence entière, mais nous ne le savions pas.
...
Aujourd'hui, je me dois d'essayer de reprendre le fil, de ressusciter ce qui peut l'être du merveilleux de ce temps-là. Je sais seulement, depuis le tout début, qu'il faudra bien l'écrire un jour. Que c'est à moi que la tâche incombe."


Extrait de "Rue du Pré aux Chevaux":

" Souvent le matin, quand il part, il dit: Je m'en vais chercher le soir. J'aime la phrase. La musique de la phrase. Elle est belle. Belle comme une phrase d'écrivain ou de poète, s'il avait pour écrire autre chose qu'une bêche ou un râteau. S'en aller chercher le soir, comme si on pouvait vraiment s'en aller au devant de lui, le soir. Comme s'il existait déjà quelque part, le soir, sans qu'on le sache et qu'on soit simplement sûr d'une chose: il faut se mettre en route pour marcher à sa rencontre.
C'est pour ça que chaque matin, très tôt, il se lève quand tout le monde dort encore dans la maison. Pour s'en aller au devant de lui, le soir. Pour ne pas le manquer. Car il faut marcher longtemps. Très longtemps avant de le rencontrer, le soir. Alors, on lui tend la main, au soir, et on lui souhaite Bonsoir au soir, et on le ramène à la maison. Pour passer la soirée avec lui. Pour lui offrir un bon endroit pour la nuit, et lui souhaiter Bonne nuit au soir. Avant ça, bien sûr, à notre table, on l'inviterait à s'asseoir, le soir. Pour dîner avec lui. Pour une fois, on ne souperait pas en silence. On le ferait parler de sa journée à lui, le soir, et on lui parlerait de la nôtre aussi."



Extrait de "Oublie pas 36":

" Toi, tu rêves et tu dérives, et tu rêves tes rêves à la dérive, tu t'en vas dire J'arrive quand on t'appelle de l'autre côté de la rive. Tu dis parfois "Il pleut dans ma tête" ou "J'écoute la respiration de l'eau". Tu penses que tu as le même arbre généalogique que la pierre. Tu parles de ta soeur la pluie. Tu voudrais laisser des messages aux générations futures. Tu dis qu'un écrivain, c'est un pêcheur à la ligne. Il amorce, il lance ses gaules et il attend que ça morde. Tu prétends que les mots sont des poissons d'argent, pourtant tu dis: le silence est d'or. Tu n'as pas ta langue dans ta poche. Tu dis: "Les idées, c'est comme les chaussures, celles qui ne sont pas à votre pointure risquent de vous empêcher de marcher." Moi, pour t'ennuyer, je te réponds: "Un penseur est un va-nu-pieds".
J'invente des titres impossibles pour des livres que je n'écrirai jamais. Voyage au bout de l'ennui et Rêveries du promeneur solidaire sont mes deux préférés. Pas ma dernière trouvaille. La dernière, Luis, va savoir pourquoi, elle ne fait rire personne. Toi, au moins, tu souris, tu sais pourquoi. Ce titre, je te le dois. Ce sont tes derniers mots, la dernière phrase que tu m'aies dite. Une phrase pareille à celles que tu aimais marteler au temps de La Ruche et du travail de nuit aux entrepôts. Une phrase qui sonne. Qui résonne et qui raisonne. Une phrase qui ramène à la raison. Qui ramène à la maison: "Fils, oublie pas 36 !"

Ma bibliothèque

Dans ma bibliothèque idéale, il y a, bien sûr, les valeurs sûres, Rutebeuf, Villon, Louise Labé, Ronsard, Balzac, Verlaine, Rimbaud, Baudelaire, Flaubert, Maupassant, Louise Colet, Proust, Paul Nizan, Camus, Sartre, Queneau et Modiano, mais aussi Vallès, Jehan Rictus, Luc Dietrich, Henry Poulaille, Jean Meckert, Neel Doff, Eugène Dabit et Stig Dagerman. Stig Dagerman, pour Notre besoin de consolation est impossible à rassasier, (Actes Sud, 1981), et ce passage de la page 18 que je relis chaque matin et chaque soir de ma déjà longue vie :
"Je peux reconnaître que la mer et le vent ne manqueront pas de me survivre et que l'éternité se soucie peu de moi. Mais qui me demande de me soucier de l'éternité ? Ma vie n'est courte que si je la place sur le billot du temps. Les possibilités de ma vie ne sont limitées que si je compte le nombre de mots ou le nombre de livres auxquels j'aurai le temps de donner le jour avant de mourir. Mais qui me demande de compter ? Le temps n'est pas l'étalon qui convient à la vie."

Du Suédois Stig Dagerman, il faut tout lire, lire et relire surtout L'enfant brûlé et Le Serpent , et puis aussi Dieu rend visite à Newton , Les Wagons rouges et Le froid de la Saint-Jean.

Dans ma bibliothèque idéale, il y a Roland Dorgelès, Blaise Cendrars, Pierre Mac-Orlan, André Billy, Aragon, Paul Eluard, il y a Elsa Triolet, Simone de Beauvoir, Françoise Sagan, il y a Emmanuel Bove et Boris Vian, il y a Olivier Séchan, il y a Knut Hamsun, Per Lägerkvist, Selma Lagerlöff et Brautigan, Richard Brautigan, et Jack Kerouac, il y a Alberto Moravia, Elsa Morante et Dino Buzzati, il y a Jean Rouaud, Philippe Djian, Philippe Claudel, Philippe Delerm, et Jeanne Benameur. Il y a Friedrich Nietzsche, Vladimir Jankélévitch, Voltaire et Rousseau, Gaston Bachelard et Sören Kierkegaard.

Lieu de vie

Hauts-de-France, 80 - Somme

Types d'interventions
  • Ateliers d'écriture en milieu scolaire
  • Rencontres et lectures publiques
  • Ateliers / rencontres autres publics
  • Rencontres en milieu scolaire