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Les écrivains / adhérents

Sandrine Leturcq

Roman / Essais
photo Sandrine Leturcq

Sandrine Leturcq est née en 1973 dans les corons de la ville de Bruay-en-Artois, dans le Pas-de-Calais. Difficile quelques années plus tard d'indiquer le « métier » d’écrivain dans ses choix d’orientation : elle prend alors exemple sur Borges en devenant professeure documentaliste : bibliothécaire comme lui oui, mais dans un lycée, de façon à donner le goût de lire non pas à des lecteurs déjà convertis mais à toute une génération scolarisée avant l’âge adulte. Depuis 1995 elle rédige des articles et chroniques pour la revue nationale "InterCDI" et pilote des projets culturels en lycée, favorisant les productions artistiques des élèves. En 2011 un essai littéraire "Jacques Sternberg : une esthétique de la terreur" paraît chez L'Harmattan. Elle a également suivi une formation semi-professionnelle de scénariste en long-métrage à Paris. "La Lampe au chapeau" est son premier roman publié.

Bibliographie

– Jacques Sternberg : une esthétique de la terreur (essai), L'Harmattan, 2011
– La lampe au chapeau (roman), Carnets de Sel, 2019

Thèmes : paralittératures, lutte sociale, anarchisme, mineur de fond, journalisme

Extraits

Parmi ceux qui comme lui attendaient le prochain départ, il enremarqua certains pour qui cela devait bien être la toute première fois, le visage figé dans un masque d’appréhension, et qui, dans l’ignorance de ce qu’ils allaient trouver en bas, lançaient des coups d’œil anxieux de gauche à droite, cherchant chez les autres l’assurance qu’ils avaient perdue à l’instant présent, maintenant qu’il s’agissait de descendre bel et bien vers l’inconnu, dans les entrailles de la terre.

Mais déjà la cage remontait, libérée de son chargement humain, pour se remplir d’un autre. Et les hommes jaugeaient la solidité de ce câble auquel leur vie tenait, montant et descendant la cage d’extraction. C’était à leur tour. Allons, du courage, il fallait y redescendre. Jean en avait davantage, maintenant qu’il avait deviné la frayeur des autres, des nouveaux. Il se sentait aguerri, habitué à cette machine infernale qui les faisait chuter à une vitesse vertigineuse à plusieurs centaines de mètres de profondeur, rompu à ce labeur qui cassait un homme plus sûrement qu’aucun autre métier. Une fois les grilles refermées sur les hommes tassés, plus de vingt à se serrer les uns contre les autres, le grand plongeon commença, et pour certains, il leur sembla que leur cœur avait bien dû rester là-haut, tandis que leur corps descendait à onze mètres par seconde dans ce puits sans fond, pour peut-être atteindre les tourments de l’enfer. Par moments, des infiltrations d’eau leur sautaient au visage, leur faisant fermer les yeux de surprise, et ils ignoraient s’il valait mieux les garder ainsi ou les rouvrir tant ils avaient peur. Quand l’ascenseur s’arrêta d’un coup, ce furent les habitués comme Jean qui durent pousser un peu les nouveaux pour les obliger à en sortir sans perdre de temps, malgré leurs jambes flageolantes, leurs oreilles bouchées et leur cœur, qui ne semblait pas être redescendu à sa place, retrouvé au bord de leurs lèvres.

Extrait de "La Lampe au chapeau"

Lieu de vie

Centre-Val de Loire, 45 - Loiret